Choisir un arbre et attendre. Écouter une histoire, comme un gosse le ferait. Imaginer un livre, tenu entre les mains, et comprendre un langage inconcevable. Antoine dit qu'ils parlent à ceux qui le veulent vraiment. Antoine divague, mais qui a raison ? J'essaye de me mettre à sa place, et dans mon tour d'horizon, je vois des arbres droits et impassibles, des petits épais, des entrelacés, des tordus, des un peu courbés... J'essaye d'attribuer à chacun une histoire potentielle. Celui-là narre à coup sûr une comédie désopilante : il est littéralement plié en deux. Et celui-ci, plus loin, aux racines nues et entremêlées, renfermerait bien un thriller compliqué et croustillant à souhait. Quant à celui-là, de l'autre côté de la rivière, je parierais à ces branches tordues et fuyantes qu'il cache une sordide histoire de cul. Allons bon. Pas de ça aujourd'hui. Lentement, il entre dans mon champ de vision. Étrangement, un remue-ménage s'opère en moi. Si un arbre doit me raconter une histoire, ça ne peut être que celui-là. Je l'observe, attentivement ; il est grand, touffu de feuilles en forme de larmes. Je ne sais pas à quelle famille il appartient. C'est mieux comme ça. Pour moi, il en est l'unique et mystérieux représentant. C'est un arbre qui pleure, il me plaît. |